Intervention de Jean-Luc ROMERO,
Président d’ELCS
THS – Aix-en-Provence – samedi 11 octobre 2003
« Les élus s’impliquent beaucoup, peu, suffisamment ou pas assez dans les politiques de lutte contre les THS »
Quelques uns, beaucoup, quelques autres, peu, mais incontestablement la grande majorité de mes collègues ne s’implique pas suffisamment dans ces véritables combats pour la vie que sont les THS.
Pourquoi et que faisons nous à Elus Locaux Contre le Sida pour pousser nos collègues élus locaux mais aussi, élus nationaux, à s’impliquer, au quotidien, dans la lutte contre le sida, la toxicomanie et les hépatites.
1/ Alors, pourquoi cette implication insuffisante ?
Elu et responsable politique, je me considère d’abord comme un militant de la lutte contre le sida. Militant et surtout acteur de cette maladie.
Depuis 18 ans, je vis avec ce terrible virus. Il est devenu mon ennemi intime. Il a fait de ma lutte contre le sida, un combat individuel quotidien.
Ce combat individuel, j’ai voulu en faire un combat collectif.
Mais aussi un combat singulier car j’ai choisi, en créant Elus Locaux Contre le Sida, de mobiliser mes collègues élus, des conseillers municipaux aux parlementaires en passant par les conseillers généraux et régionaux.
En lançant, en 1995, ELCS, nous avions bien conscience de l’insuffisance de l’implication des élus locaux dans la lutte contre les THS. Mais, nous sentions aussi qu’elle devenait particulièrement nécessaire à ce moment critique de l’épidémie de VIH/sida.
Rappelez-vous : 1995, c’était un an avant l’arrivée des antiprotéases et donc des multithérapies.
Les personnes atteintes mourraient et le milieu associatif était particulièrement touché.
Les élus sont 550.000 en France. Il sont dans les coins les plus reculés du pays, là où les associations ne pénètrent pas toujours.
Ces élus sont aussi pour la plupart des bénévoles. Ils ont donc la même fibre que les volontaires associatifs. Ils ont donc toutes les qualités pour œuvrer sur les THS.
Pourtant, depuis plus de 8 ans, nous n’avons réussi qu’à en mobiliser 12.000.
Beaucoup certes, mais peu comparés aux défis des THS.
Pourquoi alors une implication aussi insuffisante ?
Tout simplement, parce que les élus ne sont que le reflet de la population, de leurs électeurs. Et nos compatriotes appréhendent les THS car ils touchent à des tabous : ceux de la sexualité et de la toxicomanie.
Et, en France, ces tabous sont tenaces. Trop tenaces !
II Que faisons-nous à ELCS pour impliquer les élus ?
D’abord, nous avons appris à être modestes. Nous savons que notre travail consiste essentiellement en « un bruit de fond. »
Mais le bruit de fond est important !
Dans un premier temps, il nous faut convaincre les élus locaux qu’ils doivent se mobilier sur ces thèmes.
Ce n’est pas toujours aisé.
La toxicomanie, le sida, les hépatites sont de la responsabilité gouvernementale.
Cela permet donc à beaucoup de se défausser. Il s’agit essentiellement pour Elus Locaux Contre le Sida de leur démontrer qu’à partir du moment où des problèmes de santé publique s’insinuent à ce point dans notre société, les élus locaux ne peuvent s’en dégager.
Par ailleurs, nous nous devons de leur rappeler aussi qu’ils peuvent intervenir par le biais de leur politique de santé locale, par le biais de la politique de la ville.
En organisant chaque semaine une réunion départementale d’ELCS dans une ville différente, nous montrons aux élus des exemples de politiques mises en place et les poussons ainsi à s’investir dans leurs communes, leurs départements, leurs régions.
Et certaines politiques locales sont même exemplaires.
Permettez-moi de prendre exemple sur la région Ile de France dont je suis élu et qui détient le bien triste record d’avoir la moitié des cas de sida de tout le pays :
- doublement des crédits du CRIPS Ile-de-France (expliquer la création, le rôle, etc)
- soutien de la réduction des risques chez les toxicomanes
- financement des associations de lutte contre le sida (conventions triennales)
- principal financeur des SOLIDAYS
- financement de préservatifs
Quand il y a une volonté, les actes suivent : c’est incontestable.
Quand les élus de Marseille décident de mettre des échangeurs de seringues dans tous les secteurs de la ville, ils le font et cela fonctionne. Les résultats pour la santé publique sont bons. Mais aussi – et cela les a surpris – les résultats sur la sécurité sont incontestablement étonnants.
Je pourrais ainsi multiplier les exemples de collectivités locales et d’élus impliqués fortement dans les THS.
Mais, je me dois de le reconnaître : les élus impliqués demeurent une minorité.
Mais une minorité agissante ! En un mot MILITANTE.
Et ce bruit de fond que font les élus impliqués, que nous faisons – à travers nos réunions, nos manifestations et nos publications - est incontestablement utile et mobilisateur.
Les élus français sont les seuls à avoir créés dans un pays dit riche une association d’élus mobilisés contre le sida.
Et nos 12 000 élus sont, aux côtés des acteurs de la lutte contre le sida, les hépatites et la toxicomanie, des militants engagés et déterminés.
Et bien qu’ils demeurent trop peu nombreux à mon goût, ils relèvent, à vos côtés, bien des défis. Ils prennent la mesure de ce combat et finiront, j’en suis persuadé, de faire des THS des questions politiques prioritaires.
A cet effet, lors des états généraux d’ELCS, qui se dérouleront à l’Assemblée nationale, le 15 novembre prochain, nous demanderons au gouvernement de faire de la lutte contre le sida et les hépatites, une cause nationale en 2005. Bref de donner enfin un signe politique fort !
Je vous remercie.